Les négociations du TTIP (Transatlantic Trade Investment Partnership1) entre l’Union européenne et les Etats-Unis puis du CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement2) avec le Canada ont donné lieu à un mouvement d’opposition sans précédent qui s’est notamment matérialisé par l’initiative citoyenne “Stop TTIP—CETA”3 ayant recueilli plus de 3,2 millions de signatures au sein de l’Union européenne.
Cette forte mobilisation citoyenne a été relayée au niveau politique tant pour le TTIP, dont la France a demandé l’arrêt des négociations en 2016, que pour le CETA, qui n’a été ratifié par le Parlement européen qu’après avoir surmonté une première opposition du Parlement wallon et a fait l’objet de recours devant la Cour constitutionnelle en Allemagne4 et devant le Conseil constitutionnel en France5 ainsi que d’une demande d’avis devant la Cour de justice de l’Union européenne (« CJUE »).6
Si ces mouvements d’opposition ont dénoncé divers aspects de ces traités — dont l’opacité des négociations,7 le manque de réciprocité, la nouvelle méthode de libéralisation des services, le mécanisme de coopération réglementaire et le risque d’abaissement des normes sociales et environnementales — c’est sans conteste le système de règlement de différends entre investisseurs et Etats (“RDIE” ou “ISDS” pour Investor-State Dispute Resolution) qui a cristallisé les plus fortes critiques.
Ce système permet à un investisseur étranger d’attraire un État en dommages et intérêts devant un tribunal d’arbitrage privé sans avoir à épuiser les voies de recours internes, lorsqu’il s’estime victime d’un traitement inéquitable par cet État, y compris du fait d’un changement du cadre législatif.
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[1] Ce projet de Traité est aussi parfois désigné par le terme TAFTA pour Transatlantic Free Trade Agreement.
[2] En français, le CETA est appelé AECG pour Accord économique et commercial global.
[3] Cette initiative citoyenne invitait la Commission à soumettre au Conseil une proposition de lui retirer le mandat de négociation en vue de la
conclusion du TTIP et de ne pas l’autoriser à signer le TTIP et le CETA. Le Tribunal de l’Union a récemment jugé que la Commission avait violé le
Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne en refusant d’enregistrer en 2014 cette proposition d’initiative citoyenne (cf. Arrêt du Tribunal de
l’Union européenne, Michael Efler c/. Commission (T-754/14) 10 mai 2017).
[4] Voir notamment le communiqué de presse (en anglais) de la Cour constitutionnelle fédérale allemande du 13 octobre 2016 [Consulté le 15 décembre 2017].
[5] Le Conseil constitutionnel a été saisi le 22 février 2017 par plus de cent députés afin d’examiner la conformité du CETA avec la Constitution.
Il a jugé le CETA conforme à la Constitution dans une Décision No 2017-749 DC du 31 juillet 2017 [Consulté le 15 décembre 2017].
[6] Le Royaume de Belgique a indiqué avoir saisi la CJUE pour avis sur la compatibilité avec les traités européens du chapitre du CETA
instituant un système de règlement des différends entre investisseurs et État (Communiqué de presse, en anglais, du Royaume de Belgique en date
du 6 septembre 2017) [Consulté le 15 décembre 2017]. L’affaire est pendante devant la CJUE (Demande d’avis présentée par le Royaume de Belgique au titre de l’article 218, paragraphe 11, TFUE, Avis 1/2017).
[7] A cet égard, la médiatrice de l’Union européenne a ouvert une enquête sur la transparence et la participation publique aux négociations du
TTIP au terme de laquelle elle a invité la Commission à prendre plusieurs mesures correctives (Cas OI/10/2014/RA Décision finale du 6 janvier 2015 [Consulté le 15 décembre 2017]).