Projet Eacop : de nouvelles difficultés procédurales pour les recours fondés sur la loi vigilance

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Alors que le Parlement européen vient de voter un projet de directive sur le devoir de vigilance, qu’en sera-t-il de son application dans les faits ? Dans un article publié dans la revue Droit de l’Environnement (groupe Actu-Environnement), Clémentine Baldon et Nikos Braoudakis analysent une des premières décisions sur le fondement de la loi sur le devoir de vigilance rendue en France il y a 3 mois.

Petit rappel du contexte : cette décision intervient 10 ans après la catastrophe du Rana Plaza. L’émotion provoquée par ce drame avait donné naissance à la loi sur le devoir de vigilance. Promulguée en 2017, cette loi a suscité beaucoup d’espoir : une dizaine de recours en cours s’appuient sur ce texte.

Qu’a dit le tribunal ?
Le recours des associations (les Amis de la Terre France, Survie et quatre associations ougandaises (AFIEGO, CRED, NAPE/Amis de la Terre Ouganda et NAVODA) est jugé irrecevable car le tribunal estime que les demandes présentés devant le juge ont évolué substantiellement par rapport à la mise en demeure initiale qui visait le plan de vigilance de Total de 2019.

La décision estime aussi que l’obligation de vigilance est une notion “imprécise, floue et souple”. Il est vrai que le décret d’application de la loi n’a pas été publié… mais le tribunal aurait pu s’appuyer sur les principes directeurs des Nations unies ou de l’OCDE, largement reconnus, pour préciser les contours de l’obligation.

Le jugement limite enfin l’action du juge des référés aux cas d’absence de plan de vigilance ou d“illicéités manifestes”, ce qui pose la question de la capacité à faire appliquer le devoir de vigilance en amont.

Bref, alors même que les travaux parlementaires mentionnaient explicitement que “le devoir de vigilance doit se doubler de voies de recours afin d’être véritablement effectif”, le juge propose une interprétation de la loi qui pousse vers la médiation et limite les possibilités de recours judiciaire effectif. La difficulté d’accès au juge sur le fondement du devoir de vigilance vient d’ailleurs de trouver une nouvelle illustration dans la dernière décision rendue le 2 juin impliquant une filiale de Suez au Chili et concluant aussi à l’irrecevabilité de l’action des associations (voir le communiqué de presse de la FIDH).

Et maintenant ?
Si la position du TJ de Paris n’évolue pas dans le cadre des autres actions pendantes, il faut espérer que le trilogue qui commence sur le projet de directive européenne entre la Commission, le Conseil et le Parlement fera émerger une version ambitieuse et applicable du devoir de vigilance.

Lire l’article complet sur le site d’Actu Environnement

 

Image : Global Atlas of Environmental Justice

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